A en croire le journal l’ Humanité du 1er Mars dernier, Monsieur Thibault est « très remonté ». Monsieur Thibault est le secrétaire général du syndicat CGT, celui là même dont la direction, au cours du dernier mouvement social d’envergure, a fait prévaloir la raison en s’opposant à la grève générale. Pourquoi Monsieur Thibault est-il très remonté ? Parce que la France et l’Allemagne veulent imposer à l’Europe leur pacte de compétitivité. Qu’est-ce que le pacte de compétitivité ? C’est, en gros, le recul de tous les droits des salariés en matière de rémunérations, de retraites, de protection sociale, généralisé à tous les pays d’Europe. Ces sacrifices sont destinés au rééquilibre des budgets de nos pays. Bien entendu petits et grands groupes industriels en sont dispensés au nom de la protection de l’emploi, protection dont l'efficacité est restée jusqu’ici très discrète.
Cette perspective est insupportable à Monsieur Thibault qui s’indigne.
Pourtant ce qui arrive aujourd’hui est la conséquence prévisible du projet de traité constitutionnel européen soumis à référendum le 29 Mai 2005, en faveur duquel Monsieur Thibault voulait voter « Oui » avant d’être rattrapé par sa base in extremis. On connaît la phrase clé qui donnait tous les pouvoirs aux financiers sur notre économie : « l’Union offre à ses ressortissants un marché unique où la concurrence est libre et non faussée. » On sait comment après avoir voté Non, le peuple a été trahi par ses élus qui ont autorisé le Président à signer le traité de Lisbonne, réplique fidèle du traité constitutionnel de 2005.
Voilà pourquoi l’indignation de Monsieur Thibault, qui était d’accord à l’origine pour la concurrence libre et non faussée, est aujourd’hui surprenante. Mais elle est bienvenue. Monsieur Thibault, maintenant convaincu s’oppose, un peu tardivement peut-être, mais vigoureusement, à l’inéluctable progression du capital et de la finance aux dépens des peuples.
Que fait-il ? Peut-être pensez vous qu’il va réunir ses troupes, les haranguer, leur expliquer le danger et les appeler à une réaction dure. Il ne le fera pas. Supposez que parmi les militants se dresse un illuminé pour crier « grève générale ». On sait que l’expression a le don de provoquer chez Monsieur Thibault un état d’impatience qu'il maîtrise mal.
Autre attitude : il pourrait s’adresser au pays tout entier, convoquer une conférence de presse et faire savoir au peuple à travers les médias ce qui se trame contre lui. Mais Monsieur Thibault répugne à passer pour un révolutionnaire. C’est un sage qui attache à l’ordre et à la bienséance l’importance qui leur est due.
Voilà pourquoi, très remonté, il s’en va à l’Elysée pour faire part de son amertume dans ce monde où il a ses entrées. On ne nous dit rien, et pour cause, ni sur la qualité du cognac présidentiel, ni sur l’aménité des échanges à propos de la dureté des temps pour les décideurs de tout bord. On sait seulement que l’échine de Monsieur Thibault paraissait bien courbée au moment où il prenait congé de son hôte superbe et généreux.
Voila comment, dans une conception qui lui est particulière, Monsieur Thibault a bien accompli les devoirs et subi les servitudes de son mandat syndical.
Georges Apap, Béziers le 12 mars 2011.
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1 commentaire:
Quoi d'étonnant ?
M. THIBAULT est devenu bien gras depuis sa première apparition dans les médias.
Le pouvoir sait entretenir les syndicats de manière à leur oter toute envie de jouer le rôle qui devrait être le leur, c'est à dire celui de moteur social.
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