jeudi 14 octobre 2010

La dame persécutée par les Roms

Ce qu’il y a de curieux dans cette polémique sur les Roms c’est qu'elle offre à des colères mal dirigées l'occasion de s'épancher. Ainsi, en bonne place dans le « Midi Libre » du Samedi vingt cinq Septembre, une dame en plein désarroi, affiche son ressentiment quand elle s’aperçoit que depuis plusieurs semaines un groupe de Roms a occupé un terrain vague qu’elle n’entretenait pas et, lors de son expulsion forcée, y a abandonné de la ferraille et une caravane défoncée. Or, à bien lire cette plainte, on s’aperçoit que l’indignation de la dame, qui en bonne logique aurait dû viser les Roms, se dirige vers nous qui défendons leur cause, nous, membres du Collectif de soutien au Roms de Béziers et du Biterrois. Voyez comme elle nous invite à les accueillir chez nous, ou encore à venir nettoyer son terrain, argument qui, selon le journaliste commentateur, comporterait une note d’humour. Laissons cette pauvre dialectique divertir ceux qui continuent à dénoncer notre naïveté supposée, et reprenons sérieusement notre réflexion, déjà exposée mais qui reste parfois inaudible. L’Europe qu’on nous a construite suppose la libre circulation des capitaux, des marchandises et des peuples. Mais notre gouvernement, pour ne parler que de lui, tente d’expulser par des moyens illégaux ceux qui sont persécutés ou maintenus dans la misère et qui croient que, pour eux, les frontières n’existant plus, ils peuvent se réfugier ailleurs que chez eux. La dame qui nous interpelle dans le « Midi Libre » s’apitoie sur leur sort et parle à leur propos de « pauvres malheureux ». Nous refusons, et ils refusent eux aussi, cette forme de pitié. Ils revendiquent, et nous revendiquons pour eux, le respect de leurs droits. Ils se demandent par exemple, et nous nous le demandons avec eux, pourquoi on a longtemps refusé à Béziers de scolariser leurs enfants et pourquoi il a fallu une décision judiciaire pour contraindre le maire à les accepter dans nos écoles, pourquoi on leur refuse le droit de travailler, et pourquoi ils continueraient à avoir le même visage apeuré que celui qu’arboraient leurs ancêtres en face de l’autorité publique dans un passé récent.
L’autorité publique justement s’évade aujourd’hui devant les responsabilités. Cette dame qui ne nous aime pas déplore l’absence d’aire de gens du voyage. Que ne se tourne-t-elle vers le maire de Béziers à qui la loi impose l’aménagement d’une telle structure ? Mais là n’est pas la question. Le sous-préfet de Béziers avait pris des engagements bien précis au cours d’une large réunion qui s’est tenue le 18 novembre dernier. Nous les avons souvent rappelés : on devait aménager un lieu d’accueil avec notamment un point d’eau et le ramassage des ordures ménagères. Si ces engagements avaient été tenus, cette dame n’aurait jamais eu à déplorer l’occupation de son précieux terrain vague. Ils n’ont pas été tenus. Notre entrevue avec le sous-préfet en Juillet dernier a montré la profondeur du mépris pour notre rappel de ses promesses.
Le plus étonnant est que, lorsque les institutions manquent aux obligations que leur impose la loi, ou se dérobent devant leur parole, c’est à nous que s’en prend la partie la moins informée de l’opinion.
Pourtant le rôle que nous avons décidé d’assumer est, entre autres, de dénoncer, et quand nous pointons du doigt les défaillances, ce n’est pas le doigt qu’il faut regarder.
Béziers le 25 Septembre 2010.
Georges Apap.